Tableau de la Fiancée Hésitante
Tableau de la Fiancée Hésitante

Female rage ou la libération féminine

Dans un monde utopique, le respect et l’égalité seraient la norme, préservant chaque individu de toute forme de violence et de discrimination fondée sur son genre. Pourtant, la réalité est tout autre, car toutes les 3 minutes dans le monde une femme subit des violences, qu’elles soient physiques ou psychologiques et toutes les 7 minutes, une femme est victime de viol ou de tentative de viol. Derrière ces statistiques glaçantes, se trouvent des vies brisées, des femmes sacrifiées sur l’autel de la misogynie et du patriarcat. Pendant que vous lirez cet article, trois femmes auront été victimes de violences, et une de viol. 

Blog
Publié le
21/5/24
Mis à jour le
9
minutes de lecture

La female rage, c'est quoi ?

Face à cette oppression persistante, la lutte féministe s’intensifie et la “Female rage” (ou rage féminine) émerge comme une réaction légitime à une société qui tolère, et même encourage l'oppression et la violence envers les femmes. Ce terme est le symbole d’une colère trop longtemps enfouie face aux injustices subies par les femmes en raison de leur genre. Cette rage n’est pas limitée à une manifestation de colère. Quand on parle de female rage, on parle plutôt d’un spectre, allant d’une confusion, d’un malaise face aux inégalités jusqu’à une rage plus “agressive”. Rage que les médias aiment décrédibiliser en nommant de féminazis, les femmes voulant lutter contre le sexisme bien trop ancré dans notre société. 

La female rage est souvent représentée comme un cri de l’intérieur, un sentiment d'oppression tellement profond qu’il ne dépasse pas les lèvres des femmes qui le ressentent, car depuis notre plus jeune âge, nous femmes, sommes conditionnées à être silencieuses, discrètes, à ne pas faire de vague. Une femme bruyante, révoltée n’est que, dans l’imaginaire collectif une hystérique, incapable de gérer ses émotions. Alors on apprend aux jeunes filles à ne pas faire de bruit, à se faire discrètes et à ne jamais prendre trop de place, car cela est le rôle des hommes. Ces hommes, qui eux, ne sont jamais diabolisés pour leur colère, leurs excès. Ces hommes acclamés pour leurs paroles, même les plus dénuées de sens, tandis qu’une femme souhaitant s’exprimer sera brûlée au bûcher.  

L’ours ou l’homme ? Nouveau débat féministe.

Depuis quelque temps, une trend a vu le jour sur TikTok, partant à la base d’une simple question posée aux femmes, préfèrent-elles se retrouver seules en forêt face à un homme ou un ours ? La réponse est claire et presque unanime, l’ours est préféré à l’homme. Cette tendance prenant de l’ampleur, des hommes ont commencé à s’emparer du sujet. Nombreux sont ceux qui choisissent également l’ours, d’autres ne saisissent pas particulièrement l’intérêt de cette question sans pour autant la remettre en cause. D’autres, enfin, offusqués par la simple idée de ne pas être choisis face à un animal sauvage, ont commencé à vouloir discréditer l’avis de ces femmes ayant choisi l’ours. Encore une fois, la misogynie a frappé, encore une fois certains hommes semblent incapables de faire preuve de suffisamment d'intelligence émotionnelle pour saisir la subtilité de ce choix. 

Pourquoi l’ours est le favoris ? 

Puisque cette question divise tant, essayons ensemble de comprendre pourquoi l’ours est le meilleur choix, car il ne suffit que de quelques minutes et d’une ouverture d’esprit juste un temps soi peu développée pour entendre les arguments apportés par de nombreuses femmes (et hommes). Alors pourquoi l'ours ? 

L’argument principal, et sûrement le plus simple à saisir, est que l’on sait à quoi s’attendre face à un ours. Ce dernier n’agira pas en fonction de la présence potentielle ou non de témoins, alors que certains hommes, dans certaines situations, ivres de pouvoir et de domination, n’hésiterons pas à prendre avantage de la vulnérabilité d’une femme s’ils savent que personne ne pourra dénoncer leurs actes. De nombreuses femmes s'accordent à le dire, le pire qu’un ours puisse faire est de les tuer, cette idée, je l'avoue, m'a noué le ventre. 

Un autre point avancé est que bien trop nombreuses sont les femmes ayant subi l’insistance d’un homme, incapbable de comprendre qu’elles ne souhaitent pas leur parler. Car non messieurs, il n’est pas du devoir d’une femme de vous sourire, être agréable et apprécier vos avances alors qu’elle ne vous a rien demandé. Un ours, en revanche, passera son chemin si l’on décide de l’ignorer, ou bien si l’on met en place un stratagème pour le faire fuir. Nombreuses sont les femmes qui préfèrent la perspective d’un ours qui décide de s’approcher un peu trop d’elles à l’idée d’un homme incapable de saisir le concept de consentement et qui malgré une indifférence des plus claires, décidera quand même de vous voir comme une proie. Malgré les contes populaires, l’ours n’est pas un animal assoiffé de sang prêt à dévorer tout campeur osant pénétrer dans sa forêt. Les deux principales raisons pouvant pousser un ours à vous attaquer sont si vous l’avez effrayé et qu’il ressent le besoin de se défendre ou si vous rencontrez une mère et ses oursons voulant simplement protéger sa progéniture. Malheureusement, trop nombreuses sont les histoires de femmes ayant subi la cruauté d’hommes. 

Enfin, cet argument est sûrement l’un des plus malheureux et pourtant si vrai. Personne ne viendra questionner la tenue vestimentaire d’une personne victime d’un ours. Soyons honnête, il serait plutôt ridicule de se demander : “cette personne a-t-elle provoqué l’ours”, “peut-être était elle trop appétissante, c’est de sa faute, elle aurait dû ne pas donner l’impression d’être délicieuse”. En revanche, bien trop souvent, des femmes victimes d’agressions sexuelles et de viols se voient pointées du doigt et lynchées sur place publique, car nombreux sont ceux qui considèrent qu’elle a provoqué l’homme, lui pauvre victime de ses pulsions. Dans le cas de l’ours, on parlera d’un accident malheureux, on pleurera la pauvre victime et jamais, au grand jamais, on ne remettra en cause la culpabilité de l’ours. 

Homme vs ours : que disent les faits ? 

Mais si on veut appuyer ce choix de l’ours, car nombreux sont ceux qui aiment tant minimiser les faits, décrédibiliser les expériences de femmes alors voilà ce que les études démontrent. Rien que dans la sphère intime, l’ONU femmes estime à 48 800 le nombre de femmes et filles dans le monde tuées en 2022, par un partenaire ou un membre de la famille. Et c’est une femme sur trois, soit 736 millions de femmes qui ont été victimes au moins une fois de violences sexuelles et/ou physiques que ce soit au sein de leur couple ou en dehors. Au 26 avril 2024 en France, on dénombrait déjà 49 féminicides depuis le début de l’année. 

Concentrons-nous maintenant sur les chiffres concernant les attaques d’ours. Et bien n’en déplaisent aux détracteurs du débat, les chances de se faire attaquer par ours ne s'élèvent qu'à 0,02%. Il n'y a en moyenne que 40 attaques d’ours contre l’homme par an, dans la majorité des cas ces attaques sont défensives. Aussi, d’après The National Park Service, les chances d’être attaqué par un ours sont de 1 sur 2,7 millions. 

Alors, oui, soyons honnêtes, le risque zéro n’existe pas même face à un ours, il reste un animal, dans son habitat naturel, prêt à se défendre face à la menace, mais ce qui est sûr, c'est que face à un ours, on sait à quoi s’attendre. Mais quand il est question d’un homme, nous ne pouvons que nous contenter de jeter en l’air une pièce en espérant que les dieux soient assez cléments pour qu’elle retombe du bon côté.

I hate all men 

Nombreux sont ceux prêt à s’offusquer lorsqu’une femme dit détester les hommes. Comment ose-t-elle mettre tous les hommes dans le même panier ? 

Cette déclaration n’est pourtant qu’un cri de rage, une dénonciation de ce que trop de femmes, si ce n’est toutes, subissent de la main d’hommes. Alors j’en conçois que tous les hommes ne sont pas des êtres dénués de conscience, prêt à torturer toute femme osant croiser leur chemin. Pourtant, si ce ne sont pas tous les hommes, c’est assez pour devoir se méfier de tous les hommes, car après tout : 

  • Not all men mais les garçons seront des garçons 
  • Not all men mais c’est aux femmes qu’incombe la responsabilité de s’habiller de façon modeste afin d’éviter d’attirer le regard des hommes. 
  • Not all men mais honte à celle qui fera l’affront de tenter ces pauvres hommes, et honte à celle qui se fera agresser par l’un d’eux. 
  • Not all men mais toutes les femmes dénonçant les violences sexuelles qu’elles ont subis ne sont que des menteuses, cherchant à détruire la réputation d’un homme.  
  • Not all men mais pourtant dès notre plus jeune âge nos pères, frères et grands-pères se méfient des autres hommes qui posent le regard sur nous.
  • Not all men mais tout ce qui touche de près ou de loin à la féminité est une insulte, signe de faiblesse et honte à celui qui risquerait d’entacher la fière image de l’homme fort et viril. 
  • Not all men pourtant toutes les femmes ont une histoire à raconter. 

Je peux bien sûr, tout à fait entendre le désir de certains hommes de ne pas être comparés à des bourreaux, pourtant, il est important de comprendre le message derrière ces paroles, derrière cette “haine de tous les hommes”. Avec un peu d’esprit critique et un soupçon de recule, il n’est pas difficile de comprendre que ces mots sont en fait une dénonciation du patriarcat, des violences sexuelles et sexistes et non une guerre déclarée à tout homme osant croiser le chemin d’une femme. 

Le female rage dans les médias 

L’art a toujours été un exutoire, une voix pour dénoncer les oppressions, et s’exprimer face à l’injustice. Le mouvement de la female rage trouve également sa place dans le monde artistique, notamment dans de nombreuses chansons, telles que celles de Paris Paloma, qui en fait une source d’inspiration centrale, comme en témoigne son titre “Labour”. Côté francophone, la chanson “Rome” de Solann, est sûrement l’un des titres les plus émouvants que je peux vous recommander.  

Mes recommandations littéraires féministes 

La littérature explore également ce thème, offrant une multitude de perspectives, animées par la volonté de mettre en lumière la lutte des femme et leurs réactions face à une oppression patriarcale omniprésente. Je vous propose ici une sélection d’ouvrages abordant ce thème, qui ont particulièrement attiré mon attention. 

“Boy Parts” d’Eliza Clark : 

Ce roman suit Irina, photographe vivant à Newcastle qui arpente les rues à la recherche d’hommes à l’apparence moyenne pour en faire des modèles de photos explicites. Après s'être vue offrir une exposition dans une galerie d’art chic de Londres, Irina est forcée de replonger dans le passé de son parcours créatif faisant ressurgir ses pratiques les plus sombres et perturbantes. Dans “Boy Parts”, nous suivons Irina dans son autodestruction, ses relations toxiques et son obsession pour un nouveau caissier de Tesco. 

“Gone Girl” de Gillian Flynn : 

Ce thriller iconique, adapté en film, suit l’histoire d’Amy et Nick, un couple en apparence parfait. Mais lorsqu’Amy disparaît mystérieusement, les soupçons ne tardent pas à se porter sur son mari. A mesure que l’enquête avance, des secrets sont révélés, et si Amy n’était pas la victime que tout le monde croit ? 

Ce roman a été un succès international et nous a offert un des monologues les plus populaires, celui de la cool girl, parfaitement conté par Rosamund Pike dans l’adaptation cinématographique. 

“A Certain Hunger” de Chelsea G. Summers : 

 Ce roman explore la personnalité complexe et tordue de Dorothy, une sociopathe anciennement critique culinaire qui nous conte l’histoire de ses crimes depuis sa cellule de prison. “A Certain Hunger” nous plonge dans l’esprit troublant de Dorothy, aux désirs et à la faim insatiables, trouvant sa satisfaction dans la chasse de ses proies de prédilection : les hommes. 

“Bunny” de Mona Awad : 

Ce roman sombre et satirique suit l’histoire de Samantha, une étudiante solitaire qui se retrouve admise dans le mystérieux cercle exclusif des “Bunnies”. Samantha est aussi intriguée que dégoutée par les filles de ce groupe, qui cachent derrière leur apparence douce et immaculée un secret des plus sordides. 

Pour conclure cet article, je sors des recommandations littéraires pour vous partager ce monologue de la série Fleabag, où Belinda explique pourquoi vieillir est une libération pour les femmes. 

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